Actualités - In memoriam Claude Gaier

Mis à jour le 26 février 2021
Mise à jour du 26 février 2021 - Un hommage rédigé par notre président, Jean-Louis Delaet.

 

Hommage à cet homme remarquable aux multiples réalisations !

 

Chargé des Relations publiques à la FN

Né à Liège en 1938, jeune licencié en histoire de l’Art, Claude Gaier entre en 1964 à la Fabrique Nationale à Herstal dont il devient membre du comité de direction en tant que responsable des Relations publiques. En 1964, la FN occupait 13.000 personnes. Une évolution industrielle mouvementée, comme en témoignent une étonnante diversité de productions, bien au-delà des armes de guerre, et un véritable laboratoire social. C’est toute cette histoire que relate le livre édité à l’occasion du centenaire de l’entreprise en 1989 auquel Claude participe bien entendu en en rédigeant la deuxième partie qui repose partiellement sur l’interview de témoins avec leur spécificité, leur oralité et leur subjectivité. Il a démontré aussi un grand intérêt à préserver des objets ou des machines-outils en les sauvant de la destruction.

Docteur en Histoire

La FN est l’héritière de cette longue tradition de fabrication d’armes du pays de Liège. Parallèlement à sa vie professionnelle, Claude Gaier entreprend une carrière scientifique. Il présente une thèse de doctorat en 1971 sur « L’industrie et le commerce des armes dans les principautés de Liège, du XIIIe à la fin du XVe siècle », sous la direction du professeur Fernand Vercauteren. Cette thèse fait l’objet l’année suivante d’une publication où, dans la préface, Claude témoigne sa reconnaissance aux maîtres qui lui ont prodigué leur enseignement à l’Université de Liège : Robert Demoulin, Léon-Ernest Halkin, Paul Harsin, Etienne Hélin, Jean Lejeune et Jacques Stiennon. Des noms qui ont fait la renommée internationale de la section d’Histoire. Il remercie aussi deux grands noms de l’euristique : Jean Bovesse (le fils de François Bovesse) et Georges Hansotte, respectivement conservateurs des Archives de l’Etat à Namur et à Liège. Ce bel aéropage était prometteur d’une production historique remarquable.

Une synthèse remarquable de l’armurerie liégeoise

Dans la continuation de sa thèse de doctorat, est publié en 1976 « Quatre siècles d'armurerie liégeoise ». C’est la première synthèse historique et iconographique de l'industrie armurière qui, de toutes les activités qui ont fait le renom de la Belgique, est l’une des plus prestigieuses avec ses produits qui ont conquis une renommée mondiale. Il traite tous les aspects de son vaste sujet : historiques, archéologiques, technologiques, économiques, sociaux, culturels, folkloriques... C'est également le premier essai de nomenclature et de typologie des armes liégeoises et de leur fabriquant. Il est illustré de cinq cents documents iconographiques anciens et modernes. Le livre est traduit en anglais chez «Sotheby Parke Bernet Publications Ltd » à Londres, et plusieurs fois réédité avec une nouvelle édition revue et augmentée en 1996 aux Editions du Perron « Cinq siècles d’armurerie liégeoise ».

Au sein de l’Association internationale des Musées d’Armes et d’Histoire Militaire

Dès la préparation de sa thèse de doctorat, il avait établi des liens cordiaux avec le Victoria and Albert Museum, la Wallace Collection et le Royal Army Museum, tous à Londres, mais aussi le Metropolitan Museum de New-York. Claude est bientôt reconnu au niveau international pour avoir écrit de nombreux articles et ouvrages  (plus de 500 références !) consacrés à l'histoire militaire, aux fortifications, à l'armement et à l'industrie des armes Membre du comité exécutif de l’Association internationale des Musées d’Armes (ICOMAM) pendant plusieurs années, Claude en devient le Président de 1995 à 2004.

Conservateur du musée d’Armes

Spécialiste de l’histoire militaire et de l’armement, Claude Gaier devait devenir presque naturellement le conservateur du musée d’Armes, à l’occasion du centenaire de ce musée ouvert en 1885 à l’initiative de la Ville de Liège et d’un fabricant d’armes local Pierre-Joseph Lemille. A côte de la mise en valeur de la très importante collection de réputation mondiale d’armes civiles et militaires, une autre mission est de préserver les traditions armurières locales plus que jamais bouleversées par l’innovation technologique et l’évolution de la conjoncture économique des années 1970 et 1980.

Secrétaire général du Grand Liège

En 1981, il devient Secrétaire général de l'association "Le Grand Liège", une fonction qu'il a remplie pendant près de 30 ans contribuant ainsi au rayonnement de la métropole de Liège. Il fut le directeur de l'exposition "Liège - Charleroi. Art et Industrie", qui eut lieu au Musée de l'Art wallon de Liège en 1987. Cette exposition fut réalisée à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'ASBL "Grand Liège".

Président-fondateur de l’Asbl « Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles »

Suite aux crises successives des charbonnages, du textile, de la sidérurgie et de la verrerie, la Wallonie voit des pans entiers de son industrie s’effondrer. A la fin des années 1970, des passionnés suivis par des universitaires échafaudent des projets ou publient des études consacrés au patrimoine industriel ancien.

Sous l'impulsion et avec l'appui de l'Exécutif de la Communauté française (aujourd’hui le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles) présidé par l’historien Philippe Moureaux, est fondée en 1984 l'Asbl "Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles", que Claude Gaier présida d'emblée et durant les dix premières années de son existence. Les trente-quatre membres fondateurs étaient animés du même désir de défendre et d'illustrer le patrimoine industriel ancien, dans un souci aussi bien scientifique qu'identitaire.

Les tâches de PIWB étaient multiples, tant son domaine de prédilection était alors nouveau. Il s'agissait de mettre en valeur les grands sites réhabilités et d'encourager la préservation de ceux, alors nombreux, qui pouvaient l'être. Il fallait aussi gérer une association qui couvrait une aire assez vaste, nécessitant de nombreux déplacements du conseil d'administration, tant pour diversifier les lieux de rencontre que pour connaître les réalités locales. En 1987, ces déplacements furent étendus aux membres eux-mêmes, en leur offrant la possibilité de visiter les divers sites intéressants au cours d'excursions organisées en Belgique et, par la suite, dès 1991, dans les pays limitrophes.

Dès sa création, l’association crée un bulletin de liaison : « Patrimoine industriel ». Ce périodique sera, pendant près d'un quart de siècle, une contribution appréciée dans le domaine qui est le sien. Articles, reportages, comptes rendus, nouvelles brèves apportent aux membres et aux autres une information soutenue et, on peut l'espérer, un stimulant à leur centre d'intérêt particulier.

PIWB mit également sur pied des expositions itinérantes (en 1985 et 1986), des colloques, notamment celui sur la reconversion des sites industriels en collaboration avec la Société royale belge des ingénieurs et des industriels (1987), PIWB participa également, en 1994, aux Journées du Patrimoine en Région wallonne, axées sur l'archéologie industrielle. Le Ministre de l'Aménagement du Territoire confia à l'association un inventaire des sites industriels wallons, projet qui fut mené de 1991 à 1993, même si, comme le regrettait Claude Gaier en son temps, "d'autres instances s'assurèrent le privilège, par la suite, de le parachever en leur nom."

En 1984, la section belge du TICCIH (The International Committee for the Conservation of Industrial Heritage), dénommée « TICCIH Belgium », fut structurée en équilibrant le nouveau PIWB et son aînée, la VVIA (Vlaamse Vereniging voor Industriële Archeologie). La Belgique accueillit le VIIe congrès international du TICCIH qui eut lieu à Bruxelles en 1990 pour lequel PIWB édita un livre de référence préfacé par son président « Wallonie-Bruxelles : Berceau de l’Industrie sur le continent européen ».

Une autre synthèse remarquable, cette fois sur les charbonnages liégeois

Malgré ses multiples obligations professionnelles et scientifiques, Claude Gaier libère du temps pour livrer un autre ouvrage qui démontre sa qualité d’historien : « Huit siècles de houillerie liégeoise. Histoire des hommes et du charbon à Liège », publié en 1988 aux Editions du Perron. Le livre est dédié à Emile Zola : «A la mémoire de l’auteur de Germinal, qui a tout vu, tout compris et tout dit » et est préfacé par Henri Delrée, directeur divisionnaire des mines honoraire. De très nombreux travaux techniques et études historiques partielles avaient été consacrés aux charbonnages du bassin de Liège, mais personne, jusque Claude, n'avait entrepris de retracer l'histoire complète de cette épopée minière. Le pays de Liège fut une des premières sinon la première d’Europe à développer l’extraction et l’exploitation du charbon. Le terme de houille est venu de Liège pour entrer dans la langue française. Il se veut une synthèse fondée sur le plus large choix de sources historiques, y compris les témoignages oraux de ceux qui ont vécu les dernières décennies des charbonnages liégeois.

Coordinateur scientifique du projet Grand Curtius

Claude Gaier quitte la présidence de PIWB pour assumer une nouvelle tâche d’importance : la conception d’un ensemble muséal d’art et d’histoire du Pays de Liège. En 1995, Claude est désigné par le collège de la Ville de Liège comme coordinateur scientifique du projet Grand Curtius. Il a le soutien d’Hector Magotte qui, de 1989 à 2006, sera échevin de la Culture à Liège. A trois reprises, bien qu’ayant atteint l’âge de la retraite, Claude Gaier a vu son contrat prolongé. Il aura œuvré à la mise en place du Grand Curtius pendant quatorze ans. En 2009, le Grand Curtius est inauguré avec cinq Départements : Archéologie, Arts décoratifs, Verre, Art religieux & Art mosan, et Armes. La même année, mission accomplie, Claude prend sa retraite, tout en restant actif comme vice-président de l'Asbl « Les Amis du Musée d'armes de Liège », ou aussi comme secrétaire de l'Asbl « Les Musées de Liège ».

Il est fait citoyen d’honneur de la ville de Liège en 2018 car la brillante carrière de Claude Gaier est indissociable de la ville qui l’a vu naître. Que ce soit en tant que collaborateur de l’Université de Liège, cadre supérieur à la Fabrique nationale, secrétaire du « Grand Liège », directeur du musée…

Le nom de Claude Gaier a toujours été synonyme de compétence, de probité, de discrétion, d’amabilité et d’un soutien éclairé aux initiatives patrimoniales. Un homme calme, sympathique, agréable, d’une érudition extraordinaire et passionné par l’Histoire, qui a joué un rôle essentiel dans la préservation et la connaissance du patrimoine armurier. 

 


Publié le 7 janvier 2021

Nous avons appris avec tristesse le décès ce 3 janvier 2021 de Monsieur Claude Gaier, à l’âge de 82 ans.

Monsieur Gaier était avant tout un expert internationalement reconnu en matière de patrimoine armurier mais il était égale­ment spécialiste de l’histoire minière liégeoise. Il avait écrit à ce titre un ouvrage qui reste aujourd’hui encore une référence en matière d’histoire des charbonnages liégeois, intitulé « Huit siècles de houillerie liégeoise » et paru aux éditions du Perron.

Il fut également un des pionniers de la sauvegarde du patrimoine industriel wallon et un des membres fonda­teurs en 1984 de l’asbl Patrimoine Industriel Wallo­nie-Bruxelles, dont il assura la présidence de 1984 à 1993. C’est assurément une grande personnalité qui nous quitte.