Actualités - Les abattoirs de Bomel (Namur) : une action citoyenne pour une nécessaire réaffectation

Publié le 11 janvier 2010

Par Michel Grawez,

En 1925, la commune de Namur décida de fermer l’abattoir situé près de la Meuse, devenu vétuste et sans possibilité d’extension. Le choix du quartier de Bomel, au nord de la ville, s’imposait pour la construction du nouvel abattoir : le marché aux bestiaux fonctionnait dans ce quartier, la gare de marchandises était proche et une rivière, le Houyoux, traversait le terrain choisi. L’architecte Rhodius, chargé des plans du nouvel abattoir, choisit la disposition-type de l’abattoir de Luxembourg. Approuvé en 1939 par la Commission technique des Abattoirs, le projet reçut l’aval de Henry van de Velde, à l’époque directeur des Services d’Architecture de l’OREC (Office de Redressement économique). Les travaux auraient dû s’achever en août 1940. Le site fut occupé par les Allemands, puis, à partir de septembre 1944, par l’armée américaine. Les travaux reprirent en novembre 1945. L’inauguration eut lieu en octobre 1946. L’abattoir ferma ses portes en 1988, suite à l’application de nouvelles normes européennes.

Le site fut ensuite occupé simultanément par des services communaux, par l’Abri de nuit pour les SDF, par une asbl d’insertion de personnes handicapées et par le service de formation aux métiers de la construction du Forem (qui, sans aucun respect pour la partie du site qu’il occupait, en a défiguré l’architecture). Il est vide à ce jour.

Le site s’étend sur un hectare : environ la moitié est bâtie, le reste est composé de cours et d’espaces dégagés, ainsi que d’une zone de 20 ares, actuellement cultivée en potager par des riverains.

En 2002, le comité de quartier de Bomel1 était informé du projet communal de détruire les anciens abattoirs de Bomel pour y réaliser un stationnement d’automobiles.

Ce fut le départ d’une réflexion menée par des habitants du quartier : pétition de 1000 signatures pour demander le classement, rencontres - parfois houleuses - avec des responsables politiques, conférences de presse… La mobilisation des habitants a mis en évidence l’intérêt tant patrimonial que social de ce site, ce qui amena finalement le pouvoir politique communal à sauvegarder cet ensemble architectural intéressant et à envisager sa réaffectation.

Les abattoirs de Bomel à Namur constituent un rare témoin d’une architecture plutôt moderniste qu’Art Déco. La fonction industrielle y a clairement déterminé l’agencement de l’espace. On peut y lire tout le processus industriel de l’abattage. Les architectes de l’époque affectionnaient la brique jaune, les prises de lumière en briques de verre, les portes métalliques avec des prises de jour en verre coloré, les contrastes entre pans courbes et orthogonaux ainsi que les corniches en saillie. L’abattoir possède une grande diversité de bâtiments et d’espaces qui pourraient se prêter à de nombreux usages.

Le site est situé dans un quartier densément peuplé, qui manque d’espaces dégagés et d’infrastructures communautaires, mais qui reste attractif pour les habitants, vu la proximité de la gare et du centre-ville. L’enjeu, de taille, est de concevoir un projet qui permettrait le développement d’activités collectives utilisant toutes les ressources : le bâti avec ses différents volumes, les espaces dégagés et l’espace de jardin ; l’ouverture de cet espace clos pour favoriser la mobilité douce à travers le quartier ;  la création de quelques nouveaux logements sur une partie périphérique du site, le long de la rue de la Pépinière.

Le comité de quartier est persuadé que le site et les structures des anciens abattoirs de Bomel constituent un bien patrimonial collectif digne d’être conservé, mis en valeur et recyclé, c’est-à-dire adapté à des fins d’équipements sociaux, culturels et récréatifs dont le quartier environnant est aujourd’hui dépourvu. Mais le site est trop grand pour les seuls besoins du quartier, et le souhait est de voir la Ville de Namur y installer des activités au profit de l’ensemble des habitants de la ville.

Le 19 octobre dernier, le Conseil communal de Namur a voté à l’unanimité le « Schéma directeur de Bomel et Saint-Servais ». Le combat du Comité de quartier pour la sauvegarde et la réaffectation de ce site remarquable trouve enfin une issue favorable : la réaffectation du site de l’abattoir y tient une place centrale pour la revitalisation du quartier de Bomel. Trop souvent négligé comme le sont souvent les quartiers « derrière la gare », Bomel contient des biens significatifs contribuant à la mémoire et à l’authenticité de cette ville et de son architecture.

C’est pourquoi, il est nécessaire de réaliser une analyse architecturale complète et profonde de ce site, afin de mettre en valeur ses éléments Art Déco et Modern Style industriel. Appel aux amateurs !

 


1 Voir à ce sujet le site www.bomel.namur.be, onglet « Découverte »